ISABELLE BONZOM
UNE ÉROTISATION DE LA VIANDE ET DU PAYSAGE
Texte de Vincent Cristofoli
En 1996, Vincent Cristofoli, directeur des musées de l'île de Noirmoutier, donnait carte blanche à Isabelle Bonzom pour une exposition personnelle in situ, intitulée Analogies. Sept ans après, à l'occasion d'une autre exposition en Vendée au Centre d'art de la Ville des Herbiers, Vincent Cristofoli évoque l'évolution de cette peinture. Voici quelques extraits de son texte écrit dans le catalogue, Isabelle Bonzom. Corps à corps, terre à terre.
"Y a-t-il chez Isabelle Bonzom une érotisation de la viande et du paysage ?
La route est comme un choc. Ses assemblages de volumes voient l’ombre se poser comme une lacération. Les oppositions de surfaces sont rendues par la matière. Elle les a délibérément choisies, placées, gardant en tête son goût et sa formation à la fresque... Elle oppose les surfaces, l’une fluide, l’autre non et les coloris aussi : chauds, froids, sourds, vifs. Elle se plaît à produire, sinon un, mais des contrastes marqués et sa palette monte en gamme, en éclat. Maintenant elle oppose les matières et les tons.
La lame du pinceau a laissé une entaille noire dans les chairs du support.
La mer est fendue par la digue, l’espace, celui du mur, devenu celui de l’imagination dans le cas de son travail à la maison d’arrêt de St Malo, est matérialisé, mais bel et bien fendu, lui aussi par la plongeuse à la ligne acérée.
Les paysages de campagne sont eux-mêmes coupés par un chantier. C’est l’autoroute en construction qui passe. Alors, ça coupe la terre, la fend en son sein comme un soc et cela va plus profond encore.
Elle nous propose un état, un moment dans le temps. C’est suspendu. Il n’y a pas de regret, juste un constat plein de délectation...
Finalement au-delà de la suggestion qu’elle crée, à tous ces visages, à ces viandes, on peut apporter un flot de termes évocateurs : crudité, exécution, abattage… Autant de références à un univers qui va très loin.
La peinture d'Isabelle Bonzom, en tant que matière, est en évolution constante. Elle cherche des usages chromatiques, elle poursuit son travail à la fois lentement et vite, en fresquiste.
Ainsi, on peut la suivre dans ses œuvres et sentir toutes les innovations, les variations, la maturité de son pinceau et de son intention. Ses dernières toiles en appellent d’autres. Dans sa jubilation de l’acte viscéral de créer, on sent bien que de nouveaux territoires picturaux s’ouvrent à elle et par elle."
Vincent Cristofoli, 2003
© Isabelle Bonzom
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