ISABELLE BONZOM
"Relations privilégiées"
Claude Baudez à propos de la peinture d'Isabelle Bonzom
Une des préoccupations d’Isabelle Bonzom est de trouver des alliances fécondes entre ce qu’elle peint et ce sur quoi elle peint, entre la peinture et son support. Des rencontres a priori fortuites deviennent des liaisons amoureuses dans lesquelles le support est le faire-valoir de la peinture et réciproquement.
Dans la série « Chantiers », des outils, un boulon et ses écrous, parfois même des immeubles sont peints à l’encre et aux crayons sur des tuiles plates et rectangulaires de taille variable. Superbe matériau qu’est la tuile, à la fois rugueuse, brutale, et si délicate de couleurs! Comme un vestige archéologique, elle porte sur sa face hâlée et burinée les marques de son passé: les brûlures de la cuisson, les morsures des intempéries, les souillures recueillies au cours de la démolition.
Les objets dessinés très sobrement y font des apparitions: souvent en mouvement et débordant en partie du cadre, ils traversent la tuile, comme un oiseau le champ d’une lucarne. Les changements de perspective, les variations de taille du gros plan au plan éloigné, le jeu entre opacité et transparence augmentant la dynamique de ces apparitions et suggèrent des métamorphoses, surtout perceptibles dans l’ensemble des boulons-écrous à géométrie variable qui se muent en bases de colonne ou en éclipses; l’ensemble rappelle les images arrêtées d’un même film.
Le dessin pénètre l’argile chaleureuse de la tuile, objet marqué par le temps. Rencontre imprévue et mariage heureux!
Claude-François Baudez, archéologue et iconologue, 1996
© Isabelle Bonzom
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